Un "mur anti-drones", priorité de l'UE face à la Russie

L'UE a érigé en priorité la mise en oeuvre d'une défense antidrones après plusieurs incursions de la Russie dans son espace aérien. Mais de quoi parle-t-on exactement ? 

"Les drones redéfinissent déjà la guerre. Avoir des défenses contre les drones n'est plus une option pour quiconque", a déclaré le 16 octobre la cheffe de la diplomatie de l'UE Kaja Kallas, en présentant une "feuille de route" visant à assurer une défense "crédible" de l'UE d'ici 2030 face à la Russie.

Bruxelles souhaite la constitution dès 2026 d'un système de détection, à l'aide de capteurs terrestres ou par satellite, avant de se doter de capacités de traçage et d'interception de drones d'ici à 2027. 

Ce "mur" antidrones, rebaptisé Initiative européenne sur les drones, sera d'abord mis en oeuvre dans les pays les plus proches de la frontière russe, sur le flanc oriental de l'UE, avant d'être étendue à d'autres Etats de l'Union, selon la proposition de la Commission européenne.

La réponse de l'Otan à l'entrée en septembre d'une vingtaine de drones russes dans l'espace aérien de la Pologne avait mis en évidence les lacunes dans l'arsenal européen. Pour abattre trois de ces drones, l'Otan avait dû recourir à de coûteux missiles.

Afin de mettre en oeuvre ce nouveau système de défense, l'UE entend s'appuyer sur l'expérience acquise par l'Ukraine depuis son invasion par l'armée russe en février 2022. Ce pays, qui doit intercepter chaque nuit ou presque des centaines de drones lancées par la Russie sur son territoire, est l'un des très rares pays européens à fabriquer des drones anti-drones, beaucoup plus économiques.

La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a été la première à évoquer l'idée d'un "mur" anti-drones européen lors d'un discours mi-septembre. 

"Ce n'est pas une ambition abstraite. C'est le fondement d’une défense crédible", avait-elle alors plaidé, prônant la mise en place d'une "capacité européenne développée, déployée et entretenue conjointement, réactive en temps réel".

Critiques de plusieurs Etats membres 

Ce "mur" antidrones suscite la perplexité de plusieurs Etats membres, dont l'Allemagne, qui redoutent un coût élevé et ont exprimé des doutes sur la compétence de la Commission dans ce domaine.

Cette dernière insiste donc désormais sur le rôle central des gouvernements pour mettre en oeuvre les différents projets identifiés. "Les États membres sont aux commandes. Ce sont eux qui décident quoi acheter ou développer, quand et auprès de qui", a assuré Mme Kallas.

La Commission se contentera d'un "rôle de facilitateur", a expliqué de son coté le commissaire européen à la Défense Andrius Kubilius. Elle favorisera par exemple le développement de contrats en commun auprès de l'industrie de défense pour favoriser ces projets, hors de portée pour un seul pays.

D'autres pays, loin de la frontière russe, redoutent d'être laissés pour compte, selon un responsable européen. La Commission européenne, là aussi, a cherché à rassurer en promettant une stratégie à "360 degrés".

Ce "mur" anti-drones" s'inscrit dans un effort plus large de l'Europe qui veut également renforcer sa défense dans l'espace, dans les airs et sur le flanc oriental, pour muscler ses capacités face à la menace russe. 

"Au cours des dix prochaines années, nous allons dépenser 6.800 milliards d'euros pour la défense", a affirmé M. Kubilius.

La plus grande partie de ce montant viendra des budgets nationaux, mais, selon M. Kubilius, il reste quelque 300 milliards d'euros non utilisés dans les caisses de l'UE.

Les 27 peuvent également puiser dans les 150 milliards d'euros de prêts, mis à disposition par la Commission européenne dans le cadre de son programme Safe.